mercredi 29 janvier 2014


M. Alain LAMASSOURE, Député européen, nous a proposé de publier l'article suivant. Nous le faisons bien volontiers car il contribue à ce débat, indispensable, dans l'intérêt des citoyens. A ce titre, il s'incrit dans l'esprit du blog.

EUROPE : DONNONS LE POUVOIR AUX CITOYENS !

Quand l’Europe atteint 70% d’impopularité, toute la classe politique fait choeur : « il faut changer l’Europe ! », disent les uns, ou « il faut changer d’Europe !» s’exclament les autres. Et l’Europe est en danger. Quand le Président de la République atteint 80% d’impopularité, la conséquence logique est : « il faut changer de Président ! ». Et la France est sauvée.
Ainsi, la menace première contre l’Europe n’est ni la spéculation financière, ni la stagnation économique, ni les pressions migratoires. Elle tient à l’absence de dirigeant européen identifié comme tel et légitimé comme tel. Plus des deux tiers des règles de droit nouvelles qui s’appliquent désormais en France sont décidées à Bruxelles. La Commission européenne propose, les gouvernements et le Parlement européen disposent, mais le processus est collectif et anonyme. Faute d’un dirigeant qu’il a élu et qui est responsable devant lui, le citoyen n’a pas le moyen d’exprimer sa satisfaction, son mécontentement, ni finalement ses choix.

Or, voilà que l’occasion nous est offerte de mettre fin à cette situation inacceptable.
Car le traité de Lisbonne introduit un changement majeur : désormais, le Conseil européen devra prendre en compte le résultat des élections européennes pour proposer le nom du Président de la Commission européenne. Celui-ci était jusqu’à présent un haut fonctionnaire nommé par les gouvernements.
Il sera désormais élu par le Parlement.

Cette innovation est proprement révolutionnaire. Elle signifie que, si les partis politiques européens jouent le jeu, et annoncent à l’avance leur candidat(e), le Président de la Commission sera bel et bien élu par les citoyens eux-mêmes à travers l’élection du Parlement. Comme le sont les maires dans toutes nos villes, ou les Premiers ministres des autres pays européens : en votant pour la CDU, l’électeur allemand choisit Angela Merkel comme Chancelière, en votant pour le Parti Conservateur l’électeur anglais porte David Cameron à Downing Street, etc. Or, les partis européens l’ont compris : à gauche, à droite, au centre, chacun a annoncé sa procédure et son calendrier pour désigner son candidat. A partir de mars prochain, ces candidats vont sillonner toute l’Europe. Les grands médias préparent déjà l’organisation de leurs débats contradictoires : ce sera la première vraie campagne à l’échelle européenne. Succès de curiosité, l’audience de ces débats sera considérable. Les citoyens européens vont réaliser que, pour la première fois, les élections européennes ont un vrai enjeu politique, le seul enjeu qui compte en démocratie : le choix d’un cap, et celui du timonier qui devra le tenir. Si tout va bien, l’Union aura bientôt un « Monsieur » ou une « Madame Europe », fort(e) de la légitimité donnée par le vote de 500 millions de citoyens européens.
Le fonctionnement de l’Europe en sera bouleversé. Fini, le bouc émissaire anonyme ! A la fin de chaque Sommet européen, « Monsieur Europe » sera naturellement invité aux J.T. nationaux pour présenter et expliquer les décisions prises. Il aura des comptes à rendre, de ses réussites comme de ses erreurs. S’il réussit, il en partagera le bénéfice politique avec les dirigeants nationaux qui auront suivi ses propositions. S’il échoue, la réaction populaire spontanée ne sera plus « c’est la faute de l’Europe, il faut sortir de l’euro, de l’Union, de Schengen, etc. », mais : « ce type ne fait pas l’affaire, il faut en changer ». Et l’Europe sera sauvée.

Cela s’appelle la démocratie.


Alain LAMASSOURE
 

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